PHONÉTIQUE CORRECTIVE EN FLE
MÉTHODE VERBO-TONALE

Á PROPOS DE CETTE RESSOURCE

1. PERTINENCE DE CETTE RESSOURCE NUMÉRIQUE

Cette ressource pédagogique illustre concrètement l’enseignement de la prononciation à des apprenants de français langue étrangère –FLE- à deux niveaux intercorrélés: a) phonétique (correction des voyelles et des consonnes) ; b) prosodique ; interventions sur des rythmes et intonations défectueux.

Un tel document multimédia alliant des pratiques réelles de classe à des considérations théoriques les justifiant et les explicitant fait défaut jusqu’à aujourd’hui alors que la demande est grande dans le monde enseignant et de la formation de formateurs de langues vivantes. Les principes directeurs de la démarche scientifique et pédagogique à la base de ce document s’appliquent à toute autre langue.

L’oral occupe une place de plus en plus prépondérante dans notre monde actuel. Il devient également prééminent dans l’enseignement/apprentissage des langues alors que pendant des décennies c’est l’écrit qui était valorisé (jusqu’aux années 60 en FLE). Le plurilinguisme constitue un mot clé du Cadre européen commun de référence pour les langues (2001) qui prône pour chaque apprenant (défini comme un acteur social) la construction progressive d’une compétence communicative.

Dans cette optique, la maîtrise graduelle de la composante phonétique apparaît comme un atout majeur pour le succès de la communication et de l’intercompréhension entre des personnes de cultures différentes.

L’opportunité de la présente ressource numérique apparaîtra encore mieux dans les lignes suivantes exposant la situation actuelle de la méthodologie de l’enseignement de la prononciation plus communément désignée sous l’appellation de phonétique corrective.


1.1. La formation des (futurs) professeurs de langue vivante en phonétique corrective.

La formation d’un professeur de langue ne le prépare pas toujours à affronter les problèmes liés aux erreurs portant sur la matière sonore. Il reçoit de nombreuses informations sur la manière de transmettre des savoirs se rapportant au lexique, à la morphologie ou la syntaxe. Mais la phonétique constitue souvent le parent pauvre de son cursus. Soit elle est évacuée du programme de formation. Soit elle est présente sous la forme d'un enseignement de phonétique générale à base de phonétique articulatoire avec, éventuellement, un léger saupoudrage d'acoustique et maintes considérations relevant essentiellement de la phonologie. Au terme de ce parcours, le futur professeur a une vision peu glorieuse de cette discipline qu'il considère souvent comme ennuyeuse et rébarbative. La phonétique se réduit pour lui à une somme de connaissances livresques se résumant à des schémas et à des tableaux des voyelles et des consonnes, avec quelques vagues notions sur le rythme et l'intonation, le tout présenté au moyen d'une terminologie ésotérique.

Dans la salle de classe, le professeur est immédiatement confronté à des productions phoniques erronées. Il peut choisir de ne pas en tenir compte, considérant qu'une mauvaise prononciation ne constitue pas un obstacle majeur à la communication. Il peut décider d'y remédier. Mais comment faire? A quoi servent ses connaissances théoriques si elles sont inutilisables concrètement? L'acte de correction phonétique qui suppose une action efficace s'effectue en temps réel. En cas d'échec, l'enseignant a le sentiment d'avoir perdu la face devant les élèves et d'être pris au piège. Le découragement peut très vite s'emparer de lui. Il abandonne ce terrain miné au profit d'activités portant sur les autres éléments du code linguistique.


1.2. Les ressources pédagogiques actuellement disponibles en phonétique corrective.

Il en existe plusieurs :

  • Les éditeurs de FLE proposent à intervalles réguliers de nouveaux ouvrages et manuels (ou des rééditions de titres plus anciens) se présentant sous la forme d’un livre accompagné d’un cédérom illustrant des exercices bâtis autour des consignes : écoutez / répétez / comparez / lisez, combinés de différentes façons. Le contenu « théorique » de ces livres est quasi-identique depuis plusieurs décennies ; il consiste essentiellement en un commentaire de la production des voyelles et consonnes (ici : du français) à partir de schémas articulatoires. Plus rares sont les manuels accordant une place aux éléments prosodiques, soient le rythme et l’intonation ;

  • Des cédéroms dédiés à l’enseignement de la prononciation du français sont disponibles sur le marché depuis les années 1990. Leur contenu rappelle celui des manuels papier évoqués en supra. Mais ils proposent en plus divers graphes –courbes intonatives, oscillogrammes, spectrogrammes…- destinés à aider l’apprenant. Ces ressources sont implantées par des ingénieurs ou informaticiens étrangers à l'enseignement des L21 et répugnant à renseigner les didacticiens leur demandant des explicitations. Aucun mode d’emploi n’est donné sur la lecture de ces diverses visualisations de la parole. L’apprenant est considéré comme ayant naturellement des connaissances en phonétique instrumentale, lesquelles sont en tout cas largement supérieures à celles d’un professeur lambda de langue vivante. L’efficacité réelle de ces matériels et leur fiabilité sont sujets de scepticisme. Ils s’apparentent souvent à des gadgets présents dans les cédéroms pour concéder un vernis de technologie. Les possibilités offertes par le multimédia ne sont pas sans rappeler pour le moment les espoirs placés dans le laboratoire de langues dans les années 1960: la technologie au service de l’enseignement, surtout dans un domaine aussi particulier que la phonétique.

  • Il existe également des logiciels spécifiques pouvant être installés sur ordinateur et permettant d’orienter l’écoute de l’apprenant en agissant en direct sur certains paramètres acoustiques qu’il est possible de modifier en fonction de l’erreur produite. Ceci suppose une formation spécifique des enseignants tant pour l’utilisation du logiciel qu’en phonétique acoustique et perceptive. Dans le cas contraire, le professeur ne sait absolument pas ce qu’il fait. Nous n’avons pas connaissance de résultats de travaux expérimentaux attestant de la fiabilité pédagogique de ce type de matériel.

  • Des sites internet dédiés à la correction phonétique abondent. Leur contenu est très inégal. De façon générale, ils reprennent des informations disponibles dans les ouvrages au format papier. Les exercices proposés sont également de facture très classique avec des activités autour de cinq thèmes : 1) perception et discrimination auditive ; 2) répétition / intégration de mots isolés, de courtes phrases, d'exercices structuraux, de micro-dialogues, de comptines, de poèmes ; 3) sensibilisation au rythme, à l’intonation, à certaines particularités de l’oral : liaisons, élisions, assimilations… 4) relation phonie / graphie ; 5) activités ludiques diverses.

Il n’existe pas de cours multimédia d’enseignement de la prononciation en langue étrangère montrant de façon pratique comment s’effectue la correction phonétique « en direct » en salle de classe. Et notamment, comment un professeur réagit en temps réel quand il est confronté à la prononciation défectueuse d’un élève qui réalise plusieurs erreurs en émettant une suite parolière en L2 :

  • sachant que la correction porte sur un élément à la fois, quelles priorités établit-il ;

  • quel est son diagnostic de l’erreur (sans lequel la correction est vouée à l’échec) ;

  • quel type d’intervention privilégie-t-il (éléments segmentaux -voyelles et consonnes- ou prosodiques –rythme et intonation-) ;

  • quels procédés de remédiation utilise-t-il et pourquoi ;

  • comment gère-t-il la progression de l’apprenant ainsi que les inévitables moments de régression phonétique ;

  • comment intègre-t-il la correction de la prononciation aux autres moments d’une séquence pédagogique…

  • la correction phonétique est-elle réduite à ce simple échange maître-élève au cours duquel le professeur agit sur la production erronée ou bien existe-t-il d’autres activités orientées vers l’amélioration de la prononciation en L2 et donnant une plus grande autonomie à l’apprenant ?..


1.3. Les méthodes utilisées en phonétique corrective.

Depuis plusieurs décennies, deux grandes tendances s’opposent : la méthode articulatoire, la plus ancienne et traditionnelle vs la méthode verbo-tonale d’intégration phonétique apparue dans le courant des années 1950.

Rapports

méthode

amélioration production meilleure perception

articulatoire (MA)

amélioration perception meilleure production

verbo-tonale (MVT)

Ce qui frappe en MA, c’est l’absence complète de méthodologie. Il suffirait de savoir précisément comment tel son est articulé et d’effectuer les exercices pour améliorer la prononciation. Aucune démarche de travail n’est suggérée au professeur et à l’étudiant. En cas d’insuccès, que faire : recommencer l’exercice, en écoutant, en répétant, en lisant, autrement, et si oui, pourquoi ? Tout se fonde sur les connaissances déclaratives (je sais décrire l’articulation de [y], donc je peux le prononcer) alors que l’activité phonétique est un phénomène procédural (rapide, automatisé et inconscient) reflétant une habileté. Problème : les connaissances ne se transforment pas en habiletés. Sinon, cela fait longtemps que le problème aurait été réglé.

La MVT repose sur le principe de surdité phonologique en L2 : l’apprenant est sous la dépendance du système sonore de la langue maternelle (L1) acquis autour de la 5ème année ; il entend les sons de la L2 à travers le « filtre » de la L1. Il est fonctionnellement sourd et se comporte comme un dur d’oreille en L2 dont il apprécie mal ou déforme certaines sonorités. Partant, la MVT « rééduque l’oreille de l’apprenant ». La prosodie est prioritaire car perçue en premier et influençant la production des segments -voyelles et consonnes-. Plusieurs procédés, pouvant se combiner, assurent l’éradication des sonorités défectueuses. La technicité professorale est reflétée par sa capacité à diagnostiquer l’erreur, à présenter un procédé correctif, à y substituer un ou plusieurs autres en cas de revers, le tout en temps réel. Ces procédés sont amplement justifiés et commentés à destination exclusive de l’enseignant, l’élève n’ayant nul besoin de disposer de connaissances en phonétique.

Le cours multimédia constituant la présente ressource est organisé autour de séances vidéo enregistrées en utilisant la méthode verbo-tonale d’intégration phonétique. Plusieurs chapitres donnent au (futur) utilisateur toutes les explications théoriques, pratiques, méthodologiques afin de se former progressivement à employer cette méthode.


2. PUBLICS VISÉS PAR LE PROJET

Cette ressource s’adresse à des professionnels de langues vivantes en formation initiale ou continue. Elle est également destinée à être utilisée en auto-formation. Aucune connaissance préalable en phonétique n’est requise. Chaque terme ou notion fait l’objet d’une définition, d’un commentaire ou d’une illustration la 1ère fois qu’il apparaît. Un glossaire reprend l’ensemble des termes techniques.

Sont concernés les

- Étudiants en formation initiale et notamment ceux se destinant à l’enseignement du FLE ou d’une langue vivante : niveaux du L3 au M2 ;

- Professeurs de français langue étrangère et plus largement professeurs de langue vivante (enseignement primaire et secondaire);

- Formateurs de formateurs en langue étrangère ;

- Responsables pédagogiques dans des établissements privés ou publics tels que Institut français, Alliance française…

- Concepteurs de programmes dans un établissement d’enseignement, un organisme de formation ou une maison d’édition ;

- Intervenants dans une institution relevant du monde associatif pour l’accueil et l’insertion de primo-arrivants ou d’étrangers résidant en France ;

- Orthophonistes travaillant avec des primo-arrivants ou des Enfants Nouvellement Arrivés en France (ENAF).


La méthode s’applique à des apprenants de FLE de tout groupe linguistique. Les apprenants étrangers ayant prêté leur concours aux enregistrements vidéo ont un niveau linguistique correspondant aux niveaux A1 et A2, éventuellement B1 tels que définis par le CECRL (2001).


3. COMPÉTENCES VISÉES AU TERME DE LA FORMATION

L’utilisateur potentiel de la ressource devient à terme un praticien de phonétique corrective capable en temps réel de

  • hiérarchiser les niveaux de correction : prosodique, phonématique, phonétique ;

  • diagnostiquer précisément la cause d’une erreur suprasegmentale, c’est-à-dire de rythme ou d’intonation ;

  • diagnostiquer précisément la cause d’une erreur segmentale, c’est-à-dire relative à une voyelle ou une consonne ;

  • proposer plusieurs types de remédiation portant sur la correction a) du rythme ; b) de l’intonation ; c) de ces deux paramètres simultanément ;

  • proposer plusieurs types de remédiation relatifs aux voyelles et aux consonnes ;

  • appliquer la méthode à des apprenants de FLE en provenance de tout groupe linguistique ;

  • établir la carte d’identité phonétique de chaque apprenant afin d’utiliser, son par son, le procédé rectificatif optimal;

L’utilisateur potentiel de la ressource peut aussi

  • créer ses propres batteries d’exercices en fonction des problèmes de ses élèves et proposer ainsi des entourages phonétiques optimaux. Il n’est plus tributaire des manuels et méthodes avec leurs phrases toutes faites, décontextualisées et souvent proposées selon des critères indéterminés ;

  • bâtir une progression phonétique non pas fondée sur l’administration d’exercices collectifs mais prenant en compte les problèmes de chacun des apprenants au sein du groupe.


4. ORGANISATION GÉNÉRALE DE LA RESSOURCE

4.1. Cette ressource numérique se compose de 4 ensembles divisés en séquences.

L'ensemble 1 est une introduction à la problématique de l'enseignement de la prononciation;

• L'ensemble 2 est consacré aux pratiques verbo-tonales. Il constitue le coeur de la ressource. II demande un investissement certain de votre part;

• L'ensemble 3 est un parcours libre en autonomie. Il doit être abordé une fois assimilés les principes théoriques et pratiques exposés dans les deux ensembles précédents.

Il serait complétement contre-productif de commencer à l'explorer avant.

La correction phonétique est fondée sur des principes très techniques, l'interaction professeur/élève obéit à des règles du jeu très particulières qui doivent être connues des utilisateurs de la ressource préalablement à l'exploration de l'ensemble 3.

S'y aventurer d'emblée, s'est s'exposer à l'incompréhension, au découragement, à la caricature...

L'ensemble 4 consiste en un certain nombre d'outils mis à votre disposition.


4.2. Plusieurs moyens complémentaires sont exploitables pour avancer dans la ressource.

• Le "cours papier" correspondant aux textes des séquences. Il est recommandé de l’imprimer.

Les documents de travail (tableaux, schémas) doivent également être en permanence à disposition.

Naturellement, chacun doit prendre son temps pour les lire à son aise et s'en imprégner à son rythme.

• Les extraits vidéo appelés interactions

Ils sont nombreux

Ils jalonnent les commentaires et explications dispensées dans le cours papier des séquences 5 et 6.

Ils s'intègrent pleinement à ces explications:

  • ils les illustrent et les sonorisent. De fait, ils les concrétisent;

  • ils les complètent car contiennent eux-mêmes un commentaire écrit apparaissant soit

    . en incrustation pendant le déroulement de l'extrait

    . en insert à la fin de l'extrait

Ceci permet de mieux comprendre le sens de l'intervention du praticien et assure un meilleur va-et-vient avec les informations de l'exposé théorique.

Remarque importante. Ces extraits vidéo peuvent être analysés à plusieurs niveaux et de ce fait visionnés avec des objectifs différents: repérage d’un ou de plusieurs procédés correctifs, analyse de l’utilisation de la prosodie, étude de la gestualité accompagnatrice…


• Les films pédagogiques proposés dans la séquence 7.

La phonétique est certainement la discipline la plus difficile à formaliser à l'écrit.

Les films pédagogiques viennent en appui des considérations théoriques relatives aux différents procédés de correction des voyelles et consonnes, du rythme et de l'intonation.

Ils illustrent les procédés de correction décrits, les mettent en scène.

Ceci permet de

- mieux les comprendre sur le plan théorique

- mieux saisir l'action du professeur quand il intervient en temps réel, donc rapidement, dans les extraits vidéo pour les appliquer un apprenant.

A chacun de choisir sa façon d’utiliser le matériel mis à disposition : du cours papier vers les films pédagogiques (ou l’inverse), visionnement des interactions en recourant aux exemples proposés dans les séquences 5 et 6 et/ou à la vidéographie. Dans tous les cas prenez votre temps pour analyser tranquillement ces interactions, notez les n° de fichier de celles qui vous paraissent les plus pertinentes, n‘hésitez pas à les visionner à plusieurs reprises.


4.3. Limites inhérentes à la ressource.

Quelques limites éventuelles doivent être signalées:

• Cette ressource concerne principalement la correction des éléments segmentaux : voyelles et consonnes.

La correction des éléments supra segmentaux (rythme et intonation) est abordée. Mais ce domaine reste aujourd'hui encore délicat à traiter comme rappelé dans la 2ème partie de la séquence 6.


• Le travail de correction phonétique proposé dans cette ressource est limité à une action classique: le professeur invite les apprenants à répéter à sa suite différents phrases et intervient dès qu'il constate une production qu’il juge incorrecte.

Ceci peut être considéré comme n’étant pas très motivant et de nature même à engendrer ennui et démotivation à terme.

Mais cela permet, dans une perspective de formation,

- de démontrer pas à pas le travail du praticien

- de juger des progrès réalisés par un apprenant.


• Certains groupes linguistiques ne sont pas représentés. Ceci constitue un regret. Mais nous avons dû faire face à deux écueils :

  • la volatilité des étudiants qui, en dehors des cours, s'adonnent à d'autres activités et ne sont pas forcément disponibles pour participer à plusieurs séances enregistrées de correction phonétique;

  • les délais de réalisation de la ressource qui devait être produite en quelques mois ce qui a imposé de travailler avec les personnes présentes.


Quoi qu'il en soit, cette ressource présente toutes les garanties pour travailler la correction phonétique en FLE avec tout type d'apprenant.

Elle montre les difficultés rencontrées par les élèves qui produisent des énoncés où plusieurs erreurs sont produites dans la même suite parolière;

Elle illustre les choix opérés par le professeur, les techniques utilisées;

Elle établit que de progrès sont possibles assez rapidement: il est possible de suivre certains étudiants pour s’en convaincre.



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Vous trouverez dans la rubrique « mode d’emploi » située à gauche sur le bandeau horizontal du menu à l’intérieur des séquences des indications sur

  • la navigation à l’intérieur de la ressource ;

  • la correspondance entre les symboles de l’Alphabet phonétique International et des conventions graphiques employées en maints endroits de la ressource ;

  • les abréviations usuelles utilisées.



1 L2 ou LE désignent une langue étrangère. L1 renvoie à la langue maternelle ou langue première de l’apprenant.